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Author: Lusy DOLIA

Les affrontements


Les heurts des activistes de l’Euromaïdan avec les unités armées de l’Etat se produisaient en permanence durant ces mois. Au tout début, les gens n’étaient pas armés puisqu’ils sortaient pour une action pacifique ; mais ensuite, après qu’on eut tenté à plusieurs reprises le « nettoyage » du Maïdan, les gens ont commencé à s’armer eux-mêmes, de bâtons, de cocktails Molotov, (de dispositifs gazeux bricolés pour leur défense personnelle, fabriqués à partir d’essence), de pétards pour contrer les actions illégales du pouvoir. Les heurts avaient très souvent lieu la nuit lorsque la plupart des gens se dispersaient pour rentrer chez eux et qu’il ne restait plus que les hommes qui défendaient la place. C’est alors que les forces spéciales y dirigeaient leurs assauts et s’efforçaient, durant trois ou quatre heures, de déloger les gens du Maïdan, employant pour cela les jets d’eau. Durant quelques mois, on a affrété, dans différentes villes d’Ukraine, des autobus qui acheminaient à Kiev des personnes «affectées spécialement» ainsi que des forces « diverses » dont l’objectif était de chasser les activistes. Ceux qui habitaient les villes que traversaient ces autobus formaient un cordon humain sur la route et s’efforçaient par tous les moyens de les stopper. Sur le Maïdan, les gens construisaient des barricades pour se défendre et créer une rébellion contre «les personnes spécialement affectées». Le Maïdan fut assailli d’innombrables fois, les barricades furent démolies, les participants furent attrapés et placés en isolement pour enquête; mais les barricades apparurent à nouveau, des personnes de plus en plus nombreuses convergeaient vers Kiev et se rendaient au Maïdan pour défendre leur pays.

Le froid

Le froid au Maidan

Le froid au Maidan

L’hiver fut incroyablement rigoureux, tel qu’habituellement en Ukraine. Décembre ne fut pas encore tellement froid mais en janvier et février la température tomba à – 23 degrés. Les gens vécurent plusieurs mois, sur le Maïdan, dans cette température extérieure glaciale car ils comprenaient parfaitement que s’ils partaient et se rendaient, ils perdaient et ils perdaient tout ce qui avait été mis en œuvre pour en arriver là; et vaines auraient été toutes les victimes et vains tous les mutilés — et le pouvoir n’attendait que cela! Mais le peuple ukrainien est très persistant en esprit et tu ne l’effraierais pas avec le froid glacial ! Grâce aux mécènes et aux activistes, on récupéra de nombreuses paires de chaussures et affaires chaudes. Sur la scène dressée au milieu du Maïdan, il y avait constamment quelqu’un qui intervenait, et une idée réchauffait les gens, l’idée de l’indépendance. Les militants et les participants se sont fabriqués des tonneaux spéciaux auxquels on pouvait se réchauffer et auprès desquels on pouvait se reposer. Certaines tentes possédaient un chauffage: on pouvait aussi s’y reposer et s’y réchauffer. Parfois, en période d’affrontement, les gens étaient amenés à se tenir debout pendant des heures dans le froid glacial, défendant ainsi les « frontières » de leur Maïdan de la milice et des troupes de l’armée; dans ce même temps, la milice renouvelait constamment ses troupes, effectuait des roulements, permettant ainsi à ses hommes de se reposer et de se réchauffer. Il faisait froid, l’ambiance était lourde et effrayante parce que personne ne savait ce qui allait advenir, mais tous savaient qu’il fallait rester. Et le Maïdan a tenu… a tenu jusqu ‘au coeur du printemps.

Les victimes

Les victimes au Maidan

Les victimes au Maidan
Les mois suivants sont les mois de protestation du peuple ukrainien contre le pouvoir en place et les actions des unités spéciales. Les événements du 20 février ont révolté les Ukrainiens et les gens ont commencé à sortir massivement dans les rues de leurs villes. Chaque jour, le soir après le travail, les gens se rendaient sur l’Euromaïdan où ils passaient du temps: ils y exprimaient leurs pensées, chantaient, lisaient des poèmes et échangeaient des plans pour les actions à venir. Cela dura ainsi quelque temps. Le 22 janvier 2013, les premiers morts surgirent sur le Maïdan, : Sergueï Nigoyan, Birman, puis Mikhaïl Gysnevskij, Biélorusse. Ils furent abattus avec des armes à feu dans les affrontements de la Rue Hroushevski ; le jour suivant, deux autres opposants furent blessés et moururent. Ce jour-là, on trouva encore, à la périphérie de Kiev, un corps, celui de Yuri Verbytskiy, activiste, kidnappé d’un hôpital. Ce fut le début du Maïdan Sanglant, où des gens moururent pour leurs droits et leur indépendance. Durant janvier et février, des activistes commencèrent à disparaître régulièrement à la suite d’affrontements avec la milice. De nombreuses personnes furent blessées mais les actions du 22 février 2013 s’avérèrent terminales et les plus dramatiques de l’histoire de l’Ukraine indépendante. En une journée, en l’espace de quelques heures, plusieurs centaines de personnes furent gravement blessées et une centaine d’opposants trouvèrent la mort. Ils furent abattus par des snipers dans le cadre d’une dénommée « action antiterroriste » menée par l’ancien président Yanoukovitch et son ministre de l’Intérieur, Zakhartchouk Vitaly Yurevitch.
Ce furent les moments les plus difficiles et les plus tragiques pour le peuple ukrainien parce que le Maïdan fut ensanglanté du sang des protestataires.